4.2.05

Pour comprendre ce qui suivra (dans le temps)

Je m'aperçois que dans mes textes, j'utilise parfois le Wallon plutôt que le Français.
J'aime en effet m'exprimer dans ma langue maternelle de Wallon, bien que, petit citron innocent, j'ai été forcé par mon père, mon instituteur, mon garde champêtre, mon maïeur, mon notaire, bref par tout le système francophone, à apprendre à n'utiliser que le Français.
Heureusement que quelques garnements de mes amis, planifiaient tous nos mauvais coups dans la langue de mes ancêtres : ça m'a permis de devenir parfait locuteur Wallon - car ils passsaient beaucoup de temps à m'expliquer mon rôle dans leurs mauvais plans: Sans que je m'en doute, ce rôle était toujours celui qui convenait pour que le maître d'école, le curé, ou le fermier chez qui nous allions faire notre coup en attribue la responsabilité à ... Innocent Citron bien sûr.

C'est donc de mon enfance aventureuse (!) que je tiens ma maîtrise de la langue Wallonne; ma maîtrise duFrançais, je la tiens de Papa.
Il faut dire que mon père s'appellait Aimable Citron, ce qui le prédisposait à croire tout ce que le système lui racontait pour lui extorquer un maximum de ses revenus. Et à tout faire pour que sa progéniture aille dans la même direction, et si possible un peu plus loin que leur père.

Un wallon à l'Yser pris pour un franskilloen égaré dans la cage au lion (flamand)
On notera au passage qu'Aimable Citron, mon père était lui même fils d'Aimable Citron, c'est à dire celui de mes grand pères qui s'est fait gazer sur l'Yser en 1914. Ne parlant que le Wallon, comme bien d'autres de ses camarades, - sauf les Flamands qui ne parlaient eux que ... le Flamand - il ne comprenait pas les ordres de ses officiers, tous membres de la classe dirigeante - donc utilisant exclusivement le Français.
Quand mon grand père Citron a entendu crier "Attention, attention, alerte aux gaz, veuillez porter votre masque au plus tôt", le pauvre Aimable a compris
"Ah, tension à l'eure togaze veulié. Portez vos masse qu'au Pluto"
ce qui ne veut pas dire grand chose en Français, mais qui, comme le lecteur intelligent l'aura compris, ne signifie pas grand chose en Wallon non plus.

Le pélerinage à la tour de l'Yser
Des années plus tard le pauvre Aimable, entre deux quintes de toux à l'Ypérite, enseignait à toute sa descendance les avantages incontestables de celui qui peut parler la langue des riches.
Pendant ce temps, de l'autre côté de la frontière linguistique, tous ses frères flamands, anciens combattants comme lui - mais qui ne croyaient déjà plus en la Belgique- ont inventé le pélerinage de l'Yser: ils voulaient commémorer leurs pauvres soldats qui y avaient tant souffert parce qu'ils y étaient commandés par des officiers qui ne parlaient pas leur langue.
Et quand Aimable Citron, muni de sa canne, de son drapeau, arborant toutes ses décorations en bandouillère s'est présenté à la gare de Dixmude, le jour du pélerinage, et qu'il a demandé ou avait lieu le rassemblement, il a été proprement déculotté et renvoyé immédiatement dans ses foyers comme s'il s'était agi d'un franskilloen égaré dans la fosse au Lion (Flamand). Il est rentré chez nous sans son drapeau, sans sa quicaillerie, mais avec la certitude qu'un jour viendrait où le français disparaîtrait de la Belgique.

Bon bén voilà tout : je voudrais bien utiliser le wallon mais Papa ne veut pas.

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